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Billet d’humeur n°019 d’André Silver Konan: « On ne mange pas la route, mais la route fait manger »


ASKAbidjan, le 16-12-14 (lepointsur.com)-J’ai entendu souvent certaines personnes sortir cette boutade ingrate : « On ne mange pas la route ». Ne nous voilons pas la face. Les personnes qui disent cela sont, soit hypocrites, soit ignorantes. Ce billet d’humeur s’adresse à celles qui sont ignorantes, pas aux hypocrites, parce que c’est connu : il n’y a pas pire hypocrite que celui qui, pour des raisons politiciennes, joue les ignorants. Lol

Cela dit, je souhaite lever une équivoque. Personnellement, je ne suis pas favorable à l’idée d’un péage en pleine capitale, mais pour ne pas être parmi les hypocrites que j’ai décrits plus haut, je dois bien avouer que j’ai conscience que le développement a un prix, et un prix qui doit être supporté. Il n’empêche, je fronce toujours les sourcils à l’idée de devoir payer à un passage, c’est égoïste, mais j’ai le mérite de le dire.

Bref. Revenons à notre boutade hypocrite. J’aimerais juste dire que certes, on ne mange pas la route (c’est d’ailleurs une lapalissade), mais la route fait manger. Je m’explique. Prenons un seul exemple : simple et pratique. Celui d’un cadre qui habite la Riviera Golf, travaille à Marcory et qui deux fois par jour ouvrable, emprunte un taxi pour se rendre au boulot et en revenir. Il paye au minimum 5 000 à 7 000 FCFA par jour (selon l’humeur du taximan), comme titre de transport. Avec le pont Henri Konan Bédié, en dépit du péage, il fera nécessairement une économie d’au moins 2 000 FCFA par jour (voire plus), arrivera plus tôt au travail, y sera plus performant, retrouvera plus tôt sa famille les soirs, suivra mieux ses enfants et son épouse sera plus heureuse (on se comprend). Sur un mois, c’est au moins 40 000 FCFA que ce cadre fera comme économie. C’est une épargne importante qui peut lui permettre d’augmenter son pouvoir d’achat, d’améliorer son niveau de vie, donc de mieux « manger ».

Ces nouveaux ponts en Côte d’Ivoire, à l’instar de toutes les autres routes construites ou qui le seront, parce qu’ils raccourcissent le trajet, font gagner en temps, en carburant, en frais de transport, en frais de réparation des véhicules (et même en omission de CO2), on ne les mange pas, dans le sens prosaïque du terme, mais ils font manger et les commerçantes du vivrier, les transporteurs, les usagers de la route ; etc. le savent.

C’est vrai, « on ne mange pas la route », mais je le répète, même à ceux qui ne veulent pas l’entendre, que la route fait manger. Et j’encouragerai tout dirigeant africain à investir davantage dans les routes et les ponts, pour désenclaver les régions, relier les villes les unes aux autres, ouvrir certains villages sur la civilisation du 21è siècle, parce que depuis que je traîne ma petite bosse à travers le monde, je n’ai jamais vu un seul pays, qui est arrivé à se développer, sans route.La route est un investissement à la fois nécessaire et impératif au développement.

 

André Silver Konan, Journaliste-écrivain

 

 

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